SWIFT gpi - de l’obligation à l’opportunité

La version SWIFT prévue pour novembre 2020 ne requiert pour une fois aucun changement de format pour les transactions financières. Ceux-ci ont été reportés à l’année prochaine, en raison de la pandémie mondiale de la maladie à coronavirus. Cependant, la demande d’une « confirmation universelle » dans le cadre de SWIFT gpi n’a pas changé. En termes simples, cela signifie que tous les participants à FIN doivent annoncer le crédit sur le compte du bénéficiaire au traqueur de SWIFT au format MT103. Les rejets doivent également être annoncés, en revanche cela ne dispense pas le retour. Le secteur bancaire doit encore une fois faire face à un cadre réglementaire contraignant, ce qui signifie moins de ressources pour les projets des clients. Mais faut-il que ce soit ainsi ? Pour répondre à cette question, voyons d’abord ce que signifie SWIFT gpi.

Depuis 2016, le thème SWIFT gpi (global payment innovation) gagne en importance. L’aspect le plus important est une référence unique UETR (unique end-to-end-reference), qui est ajoutée au paiement en début de chaîne de traitement de la banque du correspondant et conservée dans toutes les stations. Cela permet le suivi des paiements requis depuis longtemps dans l’AZV (paiements internationaux). Les informations sont collectées dans le traqueur. Le traqueur est une base de données centrale dans le nuage FIN chez SWIFT, qui lit automatiquement les informations nécessaires pour chaque paiement dans FIN et qui est complétée par d’autres messages des banques gpi.

Au début, l’UETR n’existait qu’au sein du CUG (closed user group) des institutions financières participant à l’initiative gpi et ce uniquement pour les paiements de clients (MT103). Le service standard est également appelé gCCT (gpi for Corporate Credit Transfer), rapidement complété par gCOV (gpi for Cover Payments). Après avoir traité uniquement les paiements de clients (MT103), toutes les institutions financières FIN sont désormais obligées, depuis 2018, de s’appuyer sur l’UETR pour les paiements de banque à banque (MT202/205) – c’est-à-dire pour tous les paiements. Les premiers effets positifs peuvent être remontés. Grâce à l’UETR il est désormais possible d’affirmer que « 40 % des paiements gpi sont définitifs dans les 5 minutes » ou que « 75 % des paiements gpi sont réalisés dans les 6 heures ». Avant, il n’y avait que des exemples des paiements qui arrivaient très tard (ou pas du tout) ou sans motif de paiement, mais avec des frais élevés (y compris OUR), ce qui a entraîné de nombreuses plaintes avec des demandes d’enquêtes associées. Un effet inattendu de l’introduction gpi a été la réduction considérable des demandes d’enquête.

Une institution financière gpi s’engage à un traitement le jour même si possible, à renoncer à la déduction des frais pour OUR, à transmettre le motif de paiement dans son intégralité et sans modifications (comme pour SEPA) – ce qui paraît être évident – et bien sûr à échanger des informations (si possible en temps réel) avec le traqueur non seulement sur le statut mais également sur les frais et les cours. Ces informations sont ensuite mises à la disposition de la banque du payeur agissant comme institution financière gpi. De cette manière, un autre problème de l’AZV – le manque de transparence des frais – peut être résolu. Ces avantages – et surtout ces informations – peuvent ensuite être communiqués au payeur.

Il y a aussi le thème des annulations. Si nécessaire, il devrait également être possible d’arrêter un paiement à tout moment de la chaîne du traitement bancaire. Mais de la même façon que le paiement se réalise tout au long de la chaîne, le message de rappel est également traité étape par étape par chacune des institutions financières concernées. C’est ici qu’intervient le service supplémentaire gpi gSRP (gpi Stop and Recall Payments). L’annulation est signalée au traqueur et la tentative suivante d’envoi du paiement avec l’UETR correspondant à FIN est rejetée. La longue chaîne est ignorée.

Aujourd’hui, avec la confirmation universelle, le processus est complètement transparent. De cette façon, l’institution financière du payeur reçoit non seulement l’information « paiement arrivé à la dernière institution financière de la chaîne FIN » mais aussi le statut « paiement arrivé au bénéficiaire ». Une telle confirmation faisait partie intégrante de la définition des paiements instantanés SEPA, mais c’était près de 50 ans après les premiers messages SWIFT.

Les institutions financières FIN sont désormais obligées d’envoyer une confirmation universelle. Cela ne s’applique qu’aux paiements de clients (MT103) et non à toutes les réceptions de paiements (M202/205). Les messages doivent également être envoyés pour les entrées TARGET2, car ils sont transportés via FINCopy. En bonus, l’accès web (manuel) à ce traqueur, qui n’était auparavant disponible que pour les institutions financières gpi.

L’institution financière a jusqu’à 2 jours ouvrables (certains jours fériés sont alors exclus) pour envoyer la confirmation universelle. Ce SLA sera mesuré et la bonne gestion des autres institutions financières reportée, mais cela ne devrait pas commencer avant la mi-2021. L’accès web au traqueur dépend également des bons comportements.

Les institutions financières traitant les plus petits volumes pourraient envisager l’utilisation d’un message manuel dans le traqueur. Pour les solutions automatisées, la plateforme de paiement devrait, par exemple, prendre en charge l’un des chemins offerts par SWIFT (MT199 ou API). En outre, il existe une solution dite CSV dans laquelle un certain rapport CSV dans l’interface SWIFT est utilisé pour générer les messages correspondants au traqueur.

Une institution financière qui ne fait pas partie de gpi doit alors répondre à presque toutes les exigences des institutions financières gpi. L’étape manquante n’est plus aussi grande mais le bénéfice pour vos propres clients peut être énorme. Grâce aux possibilités de gpi pour les paiements de banques à banques (MT202/205 – appelé gFIT, Financial Institution Transfer service, une option pour les institutions financières gpi), les départements internes de la banque tels que la trésorerie ou le marché monétaire peuvent également profiter de la sécurité que le « paiement est arrivé ».

Toutefois, il n’est pas aussi important pour l’institution financière de recevoir les messages de statut du traqueur pour les paiements envoyés, que d’offrir au client un service à forte valeur ajoutée – dans le meilleur des cas, la confirmation « paiement arrivé » (y compris l’information sur les frais et les cours de change). Les niveaux de service qu’une institution financière peut offrir s’étendent de l’option minimale de l’accès manuel au traqueur dans la hotline (propre à l’entreprise) jusqu’aux offres de libre-service dans le portail bancaire en ligne, en passant par l’information active par le message de statut envoyé à l’entreprise. Et cela n’est possible qu’en optant pour la confirmation universelle au service standard gpi et le gpi. C’est la nouvelle référence pour les institutions financières.

Une coopération interservices est alors nécessaire. Les services ne peuvent pas être fournis seuls par le département de paiement ou par le service informatique même, comme c’est souvent prévu pour les projets « réglementaires » dans le cas d’une nouvelle version SWIFT. Cela peut être réalisé grâce à une consultation qui inclut le processus entier.

En résumé, on peut donc constater qu’il n’y a qu’un pas entre les exigences règlementaires et les immenses opportunités, et que les perspectives de services supplémentaires pour les entreprises et les services internes des institutions financières sont énormes.



Auteur : Mario Reichel

ISO 20022 – plus actuel que jamais malgré le report


Les dés sont jetés : le 27 juillet 2020, la BCE a rejoint le vote de la communauté bancaire européenne et a accepté de reporter d'un an la date de mise en service de la consolidation de T2 et T2S à novembre 2022. De même, la date de la migration de Eurosystem Collateral Management System (ECMS) a été reportée de novembre 2022 à juin 2023, au plus tôt.

Dans le sondage réalisé en mai, les banques européennes avaient préconisé de reporter la migration. Outre les effets de la pandémie du Corona, la raison principale est le report de la migration ISO pour les paiements internationaux, déjà annoncé par SWIFT. Dans de nombreuses banques, les deux scénarios de migration convergent en un seul projet, car il n'est tout simplement pas possible de séparer les paiements via TARGET2 des paiements internationaux. Ce sont surtout les grandes banques ayant une activité de correspondance bancaire étendue qui ont vu de grands risques dans une divergence des dates de migration. Grâce à cette décision, les deux dates coïncident. EBA Clearing s'est également joint à la décision et a reporté sa migration en 2022.

Le soulagement du report était certes formidable - mais que signifie cette décision pour les institutions financières et pour leurs projets ? Que les institutions financières profitent de cette année supplémentaire pour se relâcher et ralentir la mise en œuvre de leurs projets serait la pire chose qui puisse arriver. De nombreuses institutions financières ont sous-estimé l'effort que le passage à TARGET2 exigera. Au contraire, le report offre l’opportunité de rattraper le temps perdu en œuvrant à plein régime. Faire marche arrière et reprendre le processus début 2021 n’est pas une option envisageable. Il faut également noter que la phase de démarrage des tests utilisateurs a été reportée de neuf mois seulement, de mars 2021 à décembre 2021. Déployer des ressources externes signifiera que les employés qui ont acquis les connaissances en travaillant précédemment sur les projets ne seront plus disponibles.

Il faut également prendre en compte que les spécifications qui ont déjà fait l'objet de deux adaptations cette année, continueront à l’être. La BCE doit toujours traiter les demandes de changement en attente non prévues pour la migration de novembre 2021. Cela va certainement changer avec le report. Il faut s'attendre à ce que les nouvelles UDFS publiées en novembre offrent des fonctionnalités supplémentaires qui devront être évaluées et implémentées.

L'image cible de SWIFT n'est pas non plus clairement définie. Jusqu'à présent, il est prévu qu'une plateforme pour la gestion des transactions soit développée pour servir de « hub » pour traiter les paiements internationaux. Il n'existe pas encore de spécifications publiées à ce sujet. En outre, de nouveaux types de messages ISO sont actuellement en cours de définition, par exemple pour les frais et les chèques, qui doivent également être pris en compte et mis en œuvre. La prochaine migration d'ISO est alors toujours changeante avec encore beaucoup d’incertitude à ce sujet. Ne devrait-on pas se demander si SWIFT décalera encore la migration à plus tard ? Quelle serait alors la réaction de la BCE ? Pourrait-on encore reporter TARGET2 ou serait-on alors obligé d’accepter une divergence des dates de migration ? Comment gérer les changements dans les formats de message déjà harmonisés, comme pacs.004 ?

Mais ce n'est pas tout, car la décision de la BCE concernant les paiements instantanés fait également sensation. Sur la base de discussions avec les participants du marché d'AMI-Pay, le Conseil de la BCE a décidé que tous les PSP qui ont souscrit à SCT Inst Scheme (c'est-à-dire paiements instantanés) et qui sont accessibles dans TARGET2, doivent être accessibles également dans TIPS. De plus, tous les ACH qui offrent des paiements instantanés doivent transférer les comptes techniques de TARGET2 à TIPS. La mise en œuvre est prévue pour la fin de l'année 2021. De cette manière, la BCE rend TIPS pratiquement obligatoire pour ceux qui participent déjà aujourd'hui aux paiements instantanés. C’est important car un grand nombre d'institutions financières utilisent désormais la procédure RT1 de l'EBA.

De plus, pour l’heure seule la décision a été prise et annoncée. D'autres données comme les détails techniques sont encore inconnues et seront publiées plus tard. Cela soulève la question du futur modèle tarifaire, en particulier si des frais sont facturés pour les transactions ACH cross. À quoi peuvent ressembler les frais de transaction et quel impact auront-ils sur la tarification des chambres de compensation ? Se pose également la question de l’existence d’un risque accru pour le règlement des positions telles que RT1, car avec TIPS un participant supplémentaire doit être intégré dans la chaîne.

Enfin, SEPA migre également vers la nouvelle version ISO 2019 en 2023 selon les plans actuellement annoncés de l'EPC. L'intervalle actuel d'un par rapport à la migration de TARGET2 et SWIFT peut sembler long, mais là aussi, il faut lire les spécifications, créer des concepts techniques et préparer les systèmes à l'avance. Malgré le report connu à 2023, cette migration ne doit pas non plus être sous-estimée, et nous recommandons d'aborder ce sujet le plus tôt possible.

Comme on peut le voir, les trois prochaines années apportera des différents sujets relatifs à ISO 20022 aux institutions financières et chacune devrait utiliser le temps gagné grâce au report pour redéfinir leurs priorités.

Cela nécessite un savoir-faire très spécifique et d’éviter les excès budgétaires à court terme des ressources qui seront à nouveau nécessaires de manière urgente en 2021.

Auteurs : Sabine Aigner, Thomas Ambühler